Ginsburg and Huq Interviewed in AOC about How to Save a Constitutional Democracy

Ginsburg et Huq : « Les mêmes institutions peuvent soit défendre la démocratie, soit hâter son déclin »

Depuis l’élection de Donald Trump, de nombreux intellectuels américains se sont donné une mission : sauver la démocratie. L’affaiblissement de ce régime à travers le monde, sa porosité de plus en plus grande à l’autoritarisme qui se manifeste de Brasilia à Budapest, interroge sur la capacité de résistance des garde-fous mis en place depuis les années 30. Dans How to Save a Constitutional Democracy(University of Chicago Press) les professeurs de droit Tom Ginsburg et Aziz Z. Huq reviennent sur l’enjeu central des lois et de la Constitution.

 

Tom Ginsburg et Aziz Z. Huq étaient récemment à Paris, de passage à l’antenne française de la prestigieuse Université de Chicago où ils sont tous les deux professeurs de droit, pour présenter leur dernier livre How to Save a Constitutional Democracy (University of Chicago Press, 2018, non traduit en Français). Le constat de départ de ce livre est alarmant mais simple : les démocraties sont en danger. Une vague de populistes et d’autocrates les menacent à la fois dans leur philosophie, leur action et leur structure. En cela ils s’inscrivent dans un courant de publications dont certaines ont été traduites en Français comme  Le Peuple contre la démocratie de Yascha Mounk (L’Observatoire) ou devraient l’être bientôt comme How Democracies Die (Crown) de Steven Levitsky et Daniel Ziblatt. Ils portent une critique de la constitution américaine peu commune tant le texte des pères fondateurs a tous les attributs du sacré aux États-Unis, montrant comment ce texte loin de protéger la démocratie peut en accélérer le déclin. Une analyse qui vaut aussi en Europe et dans le reste du monde. RB

Votre livre How to save a Constitutional democracy répond à l’inquiétude grandissante sur les faiblesses d’un modèle qui met à sa tête des dirigeants qui menacent de le détruire : Bolsonaro au Brésil, Orban en Hongrie et évidemment Donald Trump aux États -Unis. Comment en êtes-vous arrivés à vous intéresser, en tant que juristes, à cette question ?
Aziz Z. Huq: À cause du sentiment que l’état de nos démocraties était justement le révélateur d’un tournant majeur dans le monde. Les facteurs qui déterminent la qualité démocratique des États sont entré en pleine stagnation, et même en déclin dans certains cas, c’est du moins ce qu’ont pu mesurer des institutions comme la Bertelsmann Institute ou The Economist Intelligence Unite lors de la première décennie du XXIe siècle. L’une des manifestations de cet affaiblissement, c’est évidemment l’élection de Donald Trump aux États-Unis en 2016, et donc d’une certaine forme de comportement antidémocratique. On pourrait citer également comme vous l’avez fait d’autres formes plus extrêmes, qui ont chacune leur spécificité : en Hongrie, au Brésil mais aussi en Pologne, au Venezuela et même dans une certaine mesure en Turquie, en Inde, en Israël, au Japon… On trouve des symptômes un peu partout dans le monde. Il y a dès lors deux façons de penser ce nouveau développement dans la structure globale de la démocratie. L’une, consiste à regarder les causes générales, à faire une étude « macro » de cette tendance. C’est l’approche intellectuelle dominante en sciences politiques ou en sociologie. L’autre, qui est notre approche, consiste à adopter une démarche plus « granulaire » des processus de déclin démocratique.
On pourrait donc résumer ainsi notre contribution dans How to save a constitutional democracy : d’abord montrer que les institutions, et en particulier la loi et la constitution, se révèlent des instruments du déclin qu’on constate aujourd’hui ; ensuite, dégager les régularités dans la façon dont les lois et les constitutions se déploient en comparant les différentes juridictions. Il ne s’agit pas de nier l’importance, par exemple, de comprendre les effets de la globalisation financière, de l’automation sur les emplois industriels, la façon dont les migrations sont perçues. Ce sont des questions importantes qui jouent dans l’affaiblissement des démocraties. Mais en tant que professeurs de droit, il nous a semblé nécessaire de réaffirmer que la rédaction des lois et des constitutions, ce qu’elles disent, comptent vraiment. Nous nous efforçons, dans le livre, de présenter un compte rendu raisonnablement général de la voie à suivre.

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